Je m'addresse à votre association pour signaler un cas très sérieux
de non respect des lois de la part de deux voyageurs
qui fumaient dans un wagon non-fumeur, et de la part
du contrôleur du train, qui a refusé d'intervenir, malgré ma demande.
Je voudrais vous demander vos conseils pour les demarches
à suivre auprès des CFF et j'aimerais également savoir
si votre association, ou une autre association avec
un but similaire, pourrait m'aider dans mes démarches.
Les faits sont les suivants:
- Le 11 août 2002, j'ai remarqué deux personnes qui fumaient assises dans le
dernier wagon (wagon non-fumeur) du train Intercity
Genève-Zurich, qui part de Cornavin à 19h30.
On avait dejà passé Lausanne.
- J'ai demandé aux voyageurs qui fumaient de se rendre dans un wagon
fumeur, en disant que la fumée me dérange pour des raisons de santé.
Il m'ont répondu que je pouvais changer de wagon. Et ils
ont continué de fumer une cigarette après l'autre.
- Quelque temps après, le contrôleur est arrivé. Il a contrôlé
les billets des voyageurs qui fumaient, sans rien dire.
- J'ai insisté auprès pour qu'il demande à ces deux
voyageurs d'arrêter de fumer.
Il m'a repondu que de toutes façons, ils allaient descendre Ã
Friboug, et que je pouvais patienter.
- Je me suis permis d'insister, avec pour seul résultat que le contrôleur
n'a pas du tout été poli avec moi. Il m'a aussi dit qu'il avait beaucoup
à faire, et qu'il n'avait pas de temps à perdre à m'écouter.
J'ai encore insisté et il a finalement consenti à demander aux
voyageurs qui fumaient de se déplacer.
- J'ai demandé au controleur quel était son nom.
Il a refusé de me le donner, et quand j'ai essayé de lire son badge
avec son nom sur sa veste, il a enlevé le badge. Je me suis permis d'insister,
et il m'a finalement donné un numéro d'identification,
que je n'ai pas pu vérifier.
- Apres cet incident, le contrôleur s'est assis à coté d'une dame
qui voyageait dans la même voiture. Il est resté à bavarder avec elle pendant
une dizaine de minutes, alors même qu'il n'avait soit disant pas
le temps de m'écouter.
En bref... :
J'ai été incommodé et offensé par les voyageurs qui fumaient dans un
wagon non-fumeur, malgré mes objections. J'ai été encore plus
offensé par le comportement du contrôleur, qui a refusé de faire
son devoir et qui n'a pas voulu me donner son nom.
Peut-être que j'ai été traité comme cela à cause de mon accent étranger,
mais ce n'est de toutes façons pas acceptable.
Merci beaucoup pour votre attention et vos conseils.
Avec mes salutations distinguées.
Dr Giuseppe B., CFA, août 2002
Réponse d'OxyRomandie
Comme vous le remarquez à juste titre,
votre message soulève un problème grave de manquement aux règles
de respect des non-fumeurs et à leur droit de respirer un air non toxique.
La plus haute instance du monde de recherche sur le cancer, le Centre
International de Recherche sur le Cancer, organisme affilié à l'OMS, vient
de publier un rapport faisant la synthèse des travaux des 20 dernières
années et concluant qu'il est maintenant établi scientifiquement et d'une
façon irréfutable que la tabagisme passif est une cause de cancer, non
seulement du poumon, mais d'autres types de cancer. Etant donné la toxicité
établie de la fumée ambiante de tabac, le comportement des CFF est
inacceptable et archaïque, car il exprime un mépris pour la santé des
usagers, en donnant la priorité à une très
petite minorité de fumeurs irreductibles (en fait, les fumeurs sont dans
leur grande majorité capables de s'abstenir de fumer pendant le voyage et
préférent être dans un espace non-fumeur plutôt que confiné dans un
compartiment fumeur - voir l'exemple du TGV où les compartiments fumeur ne
cessent de diminuer, suivant en cela l'évolution de la demande).
La Suisse est caractérisée par une absence de conscience collective
des dangers du tabagisme passif et par l'ignorance des droits des non-fumeurs
de respirer un air non toxique. Ce manque de conscience et cette ignorance
ne sont pas dus au seul hasard, loin s'en faut. C'est le résultat de
décennies de désinformation, de recherches truquées, de lancement
de fausses controverses scientifiques, de lobbying commercial et politique,
en bref c'est le fruit d'une stratégie parfaitement orchestrée et
planifiée par l'industrie du tabac, à grand renfort d'agences de
relations publiques et en arrosant tout un monde d'une abondante manne
financière. Hélas, comme vous avez pu le constater par l'incident
dont vous avez été victime, les CFF n'ont pas échappé aux manigances
des cigarettiers.
Dans le rapport Lee-Glantz de l'Université de Californie commandité par
l'OMS et publié en janvier 2001, dont le titre français est L'industrie du
tabac et son influence sur la politique du tabac en Suisse couronnée de
succès, une section est dédiée au lobbying des CFF par l'industrie du
tabac. Je cite le résumé en français: « L'Association Suisse des
Fabricants de Cigarettes influença la réglementation sur le tabagisme
dans les trains avec succès grâce à des lettres envoyées aux éditeurs
de quotidiens et des requêtes directes auprès des autorités cantonales
et du directeur du réseau ferroviaire national. » D'autre part,
lorsque vous voyagez en Suisse, vous pouvez constater que dans
pratiquement toutes les gares se trouvent de grands panneaux
d'affichage faisant de la publicité pour les cigarettes,
qu'il est impossible de ne pas voir. Cet affichage représente pour les CFF
un apport financier qui semble rendre la société nationale de transport
aussi dépendante de l'argent des cigarettiers que les fumeurs sont
dépendants de leurs produits.
Ce long préambule pour vous dire que votre démarche est tout à fait légitime
et appropriée, et nous serions heureux de la soutenir. Je crois qu'il est
important de signaler le problème aux CFF en écrivant une lettre à un ou
plusieurs hauts responsables. Nous pouvons vous aider à rédiger cette
lettre, si vous le désirez. Dans un premier temps, il s'agirait d'une lettre
personnelle qui servirait de test pour voir quelle réponse les CFF donnent.
Si cette réponse n'est pas satisfaisante, nous pouvons alors intervenir en
envoyant une lettre au nom de notre association, avec copie aux autorités de
santé publique fédérale et cantonale, et copie à l'organisation faîtière des
mouvements de lutte contre le tabagisme. Vous pouvez aussi envisager d'envoyer
une lettre de lecteur aux principaux quotidiens de Suisse romande - c'est
une technique largement employée par l'industrie du tabac qui n'hésite
pas à mobiliser ses employés et les employés de ses filiales non-tabac
comme « lecteurs de paille » - et si elle est utilisée par
l'industrie du tabac, c'est qu'elle est efficace! Finalement, nous
pouvons aussi publier un dossier sur notre site Internet qui reprendrait
l'ensemble des documents relatifs à cette affaire, traitée en guise
d'exemple.
(Témoignage t02-002 - août 2002)