«Nos politiciens ont fait comme si la science n’existait pas» (Bertrand Kiefer)

Chez nous, le refus de la science n’est jamais frontal. Nous préférons séparer la théorie et la pratique. Qu’il y ait quasi-unanimité à propos du réchauffement climatique ne nous empêche pas de ne rien entreprendre de conséquent. En santé publique, nos politiciens ont beau accepter le savoir scientifique, ils s’en tiennent à distance dans la plupart des enjeux. Eux aussi, en majorité, choisissent l’idéologie partisane plutôt que la raison.

Lors des débats récents sur le tabagisme passif ou sur la mobilité, par exemple, ils ont fait comme si la science n’existait pas, comme s’ils ne croyaient pas une ligne des études montrant la toxicité de la fumée ou des particules fines. Bien sûr, un savoir scientifique ne détermine pas ipso facto une conduite politique. Mais nous avons vu, dans ces débats, la classe politique nier la science, argumenter de façon irrationnelle au prétexte de suivre le «bon sens», et utiliser à la légère des valeurs comme la liberté individuelle pour refuser de prendre en compte des données qui la dérangeait. Et nous avons suivi.

Auteur: 
Bertrand Kiefer, rédacteur en chef de la «Revue médicale suisse»
Source: 
Journal Le Temps, 26 septembre 2012, p14 Scanner: Anti-science complexée